Souvent les étrangers qui viennent en Slovaquie admirent et emportent en guise de souvenir les pains d'épices, petits ou plus grands, de différentes formes, décorés simplement ou richement soit en blanc, soit en couleurs différentes. Les Slovaques qui tiennent aux traditions populaires les accrochent sur leur sapin de Noël en les combinant avec des petits sujets confectionnés en paille de blé ou paille de maïs. En même temps, ces petits pains d'épices sont aussi des friandises bien appréciées des petits et des grands et chaque maîtresse de maison digne de ce nom en a une recette qu'elle aime bien. Ces recettes sont souvent un peu différentes l'une de l'autre, mais elles contiennent toujours du miel et de la farine de seigle comme base.
L'histoire du miel et des gâteaux de miel est très ancienne, il est prouvé que l'homme se servait du miel d'abeilles sauvages déjà aux temps préhistoriques. Dans une tombe égyptienne vieille de quelques milliers d'années on a trouvé les gâteaux de miel. Lors des fouilles archéologiques en Italie furent trouvés des moules en argile pour faire ces gâteaux. La pâte confectionnée à base de miel était idéale pour lui donner différentes formes, elle est stable, garde bien la forme qu'on lui donne et en plus, plus elle se repose, meilleure elle est. Ainsi on peut en faire des scènes de vie toutes entières, par exemple un couple de mariés dans un carrosse tiré par les chevaux.
Au Moyen Age, les gâteaux de miel furent tout simples, sans décoration, et furent confectionnés soit dans les ménages, soit par des artisans spécialisés. Dans les documents historiques nous trouvons que ce métier existait en Slovaquie déjà au 14e siècle. Ce n'est qu'au 16e siècle que cet artisanat devient plus artistique et atteint son sommet du 17e au milieu du 19e siècles. Les artisans qu'on appelait « dulciarius » étant de plus en plus nombreux, ils se faisaient de la concurrence, ils ajoutaient à leur pâte de miel différents arômes et épices pour se distinguer des autres, et commençaient à décorer leurs gâteaux, soit en les faisant cuire dans des moules sculptés en bois pour leur donner du relief, soit en faisant des petites peintures à l'aide d'un glaçage fait de sucre et de blanc d'œuf. Les motifs des décorations étaient de plus en plus riches contenant des éléments folkloriques. Quant aux moules en bois, souvent les artisans les confectionnaient eux-mêmes et les vendaient même lors des marchés et foires.
On peut dire que la ville de Bratislava fut le premier centre en Slovaquie et toute l'ancienne Hongrie où cet artisanat de confection des gâteaux de miel et des pains d'épices se développait et d'où il se répandait. Les moules de différents types en témoignent. Il existe des moules datant de 1631 reproduisant la Ste Trinité, ou de 1635 portant des lettres IS CFB provenant de Kosice et de Banska Bystrica. On suppose qu'il devait y exister un atelier qui s'occupait à sculpter ces moules en bois. Pour les enfants, on faisait des pains d'épices en forme de petits chevaux, des poupées, des fusils, des poissons, et différents autres animaux ou personnages des contes pour enfants. Pour les jeunes gens, il y avait des cerfs comme symbole de jeunesse et de force, des cœurs, des dames à l'éventail, des hussards et beaucoup d'autres. Ne manquaient pas non plus des pains d'épices figurant les scènes de vie religieuse, comme des petites crèches, la crucifixion du Christ, les rois mages ou Samson et le Lion.
Les artisans fabriquant les pains d'épices se réunissaient dans les corps de métier, dont le premier fut fondé à Bratislava en 1619. Plus tard, au cours des 17e 18e et 19e siècles, également à Trnava, Modra, Banska Bystrica, Kremnica, Banska Stiavnica, Bardejov, Levoca et Kosice.
Les artisans s'engageaient à améliorer leur production et à respecter toutes les règles du corps sous peine d'abord d'un blâme oral et ensuite d'une amende. L'apprentissage dans ce métier durait 4 ans et après examen, les jeunes gens pouvaient partir faire du compagnonnage pour apprendre encore plus auprès de différents maîtres dans des villes parfois très éloignées. Ainsi se faisait l'échange des expériences sur tout le territoire.
La seconde moitié du 19e siècle a vu le déclin du métier parce que la pâtisserie à base de sucre est venu à la mode et a commencé à se développer. Vu la variété des possibilités de la pâtisserie moderne, les gâteaux au miel et les pains d'épices se faisaient de plus en plus rares et moins consommés dans la plupart des familles. En plus, les moules sculptés en bois disparaissaient de l'utilisation, remplacés par les moules en tôle beaucoup moins chers. Les pains d'épices se faisaient alors dedans et étaient décorés de glaçages de différentes couleurs, souvent trop vives pour être de bon goût. On y ajoutait souvent des inscriptions du genre « A maman », « Je t'aime », « A mon amour » et d'autres …
De nos jours, nous voyons un renouveau de ce métier, pratiquement presque disparu dans les premières décennies du 20e siècle. Les vieilles recettes réapparaissent, quelques entreprises fabriquant des gaufrettes et des gâteaux reviennent aussi à la production des pains d'épices. Également les petits artisans particuliers s'y remettent et produisent des pains d'épices pour manger et pour offrir comme cadeau ou souvenir. Enfin, ces petits gâteaux traditionnels n'ont heureusement jamais tout à fait disparu de la vie des slovaques et il est difficile de s'imaginer qu'ils manqueraient sur les tables de fête à Noël ou à Pâques.
Si donc vous venez en visite en Slovaquie, n'oubliez pas d'en emporter un ou plusieurs. Ils vous rappelleront toute une histoire.